De nouveaux canaux de transmission ?

 

La remise en question de l'oralité...

 

    «En Afrique, un ancien qui meurt, c’est une bibliothèque qui brûle », tel est le cri d’alarme du sage africain, Amadou Hampaté Bâ au début des années 1960, à la tribune de l’UNESCO.
Dans ce cas, de nos jours, où la technologie est grandissante, ne serait-il pas judicieux de perpétuer les traditions africaines à travers l’écriture ?


    La transmission orale de la mémoire collective, peut s’opposer directement à une transmission écrite, qui serait propre au monde moderne. Cependant, il faut noter justement que l’Afrique, contrairement aux préjugés, n’a jamais été un monde sans écriture. Elle a inventé des systèmes graphiques originaux et très anciens, tels les écritures « vaî », « obéri », « nko » etc. des graphies autochtones toujours en usage dans certaines contrées. Nous arrivons donc à la conclusion que l’oralité n’est pas une culture par défaut, car en effet, ce n’est pas par manque d’écriture que les africains ont privilégié l’oralité, mais plutôt parce que celle-ci correspondait mieux à leurs besoins, à leurs mœurs, et à leurs modes de vie.
Pourtant, il reste important de créer des traces écrites, car la société africaine fonctionne en grande partie sans archives. En effet, l’oralité n’est pas « constante » dans le temps, et ne peut, d’une bouche à une autre, transmettre des informations réellement authentiques et pareilles à l’information initiale, ce qui favorise d’autant plus la fugacité de ce mode de transmission. Elle n’est donc pas réellement en mesure de retranscrire la vraie tradition ancestrale africaine. On assiste ainsi, depuis un certain nombre d’années, à un passage de l’oralité à l’écriture, qui découle d’une certaine prise de conscience que la tradition, restant uniquement orale, ne ferait que continuer un processus de déperdition qui n’est déjà que trop prononcé.
Les premières œuvres écrites évoquent les personnages prestigieux du passé comme Chaka, une épopée bantu de Thomas Mofolo (1926) ou Soundiata ou l’épopée mandingue de Djibril Tamsir Niane (1960), épopées qui, auparavant étaient transmises uniquement de manière orale, dans un cadre physique et humain plus ou moins réduit.

 

    En conclusion, culture orale et culture écrite n’obéissent pas aux mêmes principes et ne visent pas les mêmes objectifs : l’oralité c’est le monde de la tradition, tandis que l’écriture représente pour les africains le monde de la modernité occidentale. De plus, selon notre ethnologue, pendant que l’écriture et les nouveaux média éducatifs développent des relations impersonnelles, la solitude, l’individualisme et détériorent les liens humains, la parole, elle, valorise la proximité, la participation, et les échanges verbaux, faisant de la transmission des savoirs une activité quotidienne vivante et participative. Malgré tout, il est important de prôner aujourd'hui l'installation de nouveaux canaux de transmission, afin de retrouver, dans les années qui viennent, une histoire vraie et authentique de l'Afrique, car la seule oralité n'y suffit pas. D'autant plus qu'aujourd'hui, l'écriture n'est plus le seul chemin vers une perpétuation juste de l'Histoire. D'autres moyens, tels que les films, les enregistrements audio etc. sont à la portée des africains, comme nous l'a expliqué Amadou Hampaté Bâ dans la vidéo "La mission cruciale de la jeunesse africaine" que vous avez pu visionner dans la partie I.2.

 


    Nous ne pouvions aborder le sujet qui est au centre de notre étude, à savoir, les rites de passage de la jeune fille à la femme en Afrique, avant de vous avoir expliqué comment ces derniers, faisant partie intégrante des traditions africaines, sont aujourd’hui connus des africains, c'est-à-dire, avant de vous avoir exposé les moyens de transmission de la tradition. Ceci étant fait, il s’agit à présent d’effectuer une étude sur les « Formes traditionnelles » des rites initiatiques étudiés ici.